Festival Leil Tal Noudjoum, la mascarade.

Article : Festival Leil Tal Noudjoum, la mascarade.
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6 mai 2017

Festival Leil Tal Noudjoum, la mascarade.

J’aurai aimé que ma première dictée culturelle ait un goût sucré mais malheureusement ce ne sera pas le cas parce qu’elle porte sur ces promoteurs d’évènements culturels qui émergent de partout depuis un certain temps ici au Tchad. Bien! Prenez vos stylos et marquez dictée : Festival Leil Tal Noudjoum, la mascarade.

Le festival Leil Tal Noudjoum fait parti de ces festivals qui ont été enfantés dans le rêve de leurs promoteurs de caresser la visiblement très généreuse main du 1er Patron ou de la 1ère patronne du Tchad. Ces festivals sont reconnaissables à travers une formule magique très à la mode : « sous le haut parrainage de… ». Apparemment cette formule aurait le pouvoir de donner une crédibilité à l’événement et d’obliger les potentiels sponsors à mettre la main dans la poche, de peur d’aller à l’encontre d’une initiative ayant reçue l’onction présidentielle.

Seulement personne ne sait quand et comment l’onction présidentielle opère. Voici donc les promoteurs culturels très très républicains qui se retrouvent parfois en mauvaise posture et ce qui au départ devrait être un moyen d’attirer les faveurs des patrons de la République vire à la mascarade pour sauver la face.

La 1ère édition du Festival Leil Tal Noudjoum (1er au 02 mai 2015) avait déjà laissé un goût amer à la majorité des artistes et prestataires qui ont donné en énergie et en temps pour ce festival : des cachets payés de moitié d’une part et des factures pas payées carrément d’autre, personne n’aurait misé sur le fait que la promotrice pourrait récidiver, sauf elle-même apparemment. Nous Voici donc deux ans plus tard, elle remet ça. Le festival est annoncé les 05 et 06 mai 2017 avec comme tête d’affiche l’artiste nigériane Chidinma et le groupe ivoirien Révolution. En découvrant l’affiche sur les réseaux sociaux, j’ai éclaté de rire: « encore elle ? » me suis-je dit. En regardant la liste des artistes qui figurent sur l’affiche, seul le groupe D6bel était présent à la précédente édition, peut-être ont-il été entièrement payés la dernière fois.

La première alerte retentit à l’arrivée du groupe Révolution à N’Djaména : ils sont six et voilà seulement 3 chambres ont été réservées. Un problème minime qui peut se résoudre facilement. Mon attention était porté ailleurs : où est Chidinma ? L’artiste la plus attendue de ce festival ? Réponses vagues et au conditionnel des sources proches de l’organisation ; cachet pas encore totalement réglé etc. etc. Un tour rapide sur les comptes officiels de Chidinma m’a fait comprendre qu’elle ne viendra pas ; pas un seul post sur sa présence qui devrait pourtant être sa première sur le sol tchadien. Seulement, durant la conférence de presse donnée par les organisateurs rien n’est dit à ce sujet, non plus sur le compte Facebook du festival.

La soirée du 05 mai au Palais du 15 janvier semble bondée de monde même si c’est en majorité des employés directs et indirects des patrons de République sur qui on a surement fait planer le spectre de la probable présence de la 1ère patronne du Tchad. Un stratagème qui marche très bien. Le haut parrainage a cette force là. Le public est au rendez-vous, richement vêtu, tout souriant. Il y’a des discours, des remises de cadeaux, des prestations d’artistes, c’est la nuit des stars, c’est la spéciale fête des mères. Visiblement, le festival est une réussite.

Deuxième alerte : le concert au stade est annulé, certains prestataires qui avaient déjà mobilisés personnes et ressources se voient simplement dire de plier bagages sans aucun dédommagement. Devrai-je être désolé pour le public qui allait massivement et sereinement se déplacer pour le stade sans l’intention de débourser un radis pour le concert ? Tout en étant confiant d’assister néanmoins à ce concert ? J’hésite.

Selon le dictionnaire, un festival est un ensemble de manifestations artistiques (musique, cinéma, théâtre etc.) qui ont lieu périodiquement dans un endroit déterminé. Cette définition ne s’apparente pas vraiment à ce qui se passe ici, mais nous y reviendrons dans d’autres billets promis ! Le constat est que les promoteurs très très républicains tchadiens prennent de la culture pour alibi soit pour entrer ou pour exister dans le milieu très sélect et fermé des employés VIP de la République. Seulement, la victime principale de leur mascarade est la culture elle-même. Le non respect des engagements pris auprès des artistes locaux, les abus de confiance à l’endroit des prestataires, et surtout cette mauvaise presse qu’ils font à la culture tchadienne à l’international. Ça devient récurrent de voir un artiste international en tête d’affiche sur les prospectus d’événement et qu’à l’arrivée on ne le voit pas sur le sol tchadien. On se souvient encore de la vidéo de l’artiste ivoirienne Josey démentant sa présence à un festival au Tchad. Que dire des sponsors de tels événements? Quel bénéfice image tirent-ils de telle manifestation? Quel capital sympathie engrangent-ils auprès du public? Apparemment ces interrogations n’ont pas leur place. Pour certains la minute qui leur ait accordée sur le podium de la célébration, sous les feux des projecteurs et des caméras suffit largement à faire leur bonheur.

Quand on sait que la culture est la première ouverture d’un pays au monde et que les opinions internationales se forgent souvent à travers l’image culturelle que véhicule un pays, on ne peut qu’avoir les larmes aux yeux. Et le pire de tout ça est que toute cette mascarade se fait « sous le haut patronage de… »

Je pense qu’il serait temps que les autorités compétentes mettent en place des mécanismes de contrôle  afin de vérifier la capacité des promoteurs très très républicains à remplir les missions qu’ils se donnent eux-mêmes à travers leurs événements culturels entre autre se dorer le blason et permettre aux patrons de tirer un bénéfice image de leurs actions. Point final.

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Commentaires

INNOCENT BERENGER
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la vérité est dite. ces promoteurs qui surgissent de nulle part doivent se ressaisir et associer des personnes ressources au lieu de brandir les évènements sous le haut patronage de.... c'est bien dommage

Warda
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Intéressant! Merci!